lundi 8 octobre 2012

"Lutter pour les 5, c'est lutter pour un monde meilleur"


Entretien avec Alicia Jrapko, coordinatrice du Comité international pour la libération des 5. La militante revient sur les initiatives organisées tout au long de l’année 2012 sur le sol américain et estime que le président Obama, en cas de réélection, aura le pouvoir de décreter la fin de la condamnation injuste.

- Quelles sont actuellement les principales initiatives du Comité international pour la Libération des 5 aux Etats-Unis?
Les principales initiatives du comité ont eu et ont comme objectif de toucher des secteurs de la population nord-américaine qui ne connaissent pas l'affaire des 5, ce qui représente l’immense majorité. Ainsi, notre mission est très difficile étant que donné que ce pays est très grand et désinformé.
Nous avons travaillé avec des mairies, le milieu syndical, des acteurs et des artistes américains, des religieux, des intellectuels, etc… sans laisser de côté le mouvement progressiste, force fondamentale dans cette lutte.
Ces dernières années, nous avons travaillé à travers des projets d’envergure comme la tournée aux Etats-Unis de La Colmenita, le groupe théâtral d’enfants de Cuba. Nous avons pu toucher beaucoup de monde d’une manière très spéciale en brisant le silence médiatique grâce à un message de solidarité et d’amour de la part des enfants cubains.
Nous venons de conclure une tournée avec l’auteur-interprète cubain Vicente Feliu accompagné d’un excellent guitariste cubain Alejandro Valdés, deux êtres exceptionnels. Nous avons obtenu des résultats très similaires à ceux de la tournée de La Colmenita, grâce à la chanson cette fois.
De plus, nous organisons un événement public avec la participation du leader indépendantiste portoricain Rafael Cancel Miranda et Tom Hayden, qui a été durant de longues années au sénat de Californie et qui est éditeur de The Nation. A la suite de l’initiative à Washington le 14 septembre, Hayden a écrit son premier article sur les 5. Pour nous, tout cela représente des pas importants, étant donné que les médias ne couvrent pas l’affaire. Nous devons beaucoup travailler pour obtenir des interviewes dans les radios locales ou des chaînes de télévision.
Nous considérons que cette année a connu un saut qualitatif avec comme résultat les 5 jours pour les 5 à Washington en avril dernier, une projection de documentaires, des campagnes d'affichages "Obama Give me Five", des événements culturels et politiques et un rassemblement en face de la Maison blanche. Pour la première fois, de manière coordonnée, nous avons rencontré des membres du congrès et du sénat des Etats-Unis. Nous avons touché un total de 40 cabinets. Et nous avons compté sur la solidarité venant d'Allemagne, Italie, Canada, Belgique et France. C'est la première fois que nous arrivons à joindre autant de personnalités, en plus des amis solidaires d'autres parties du monde qui luttent sans ménager leurs efforts pour la liberté des 5.
Nous savons que beaucoup d'autres le font aussi mais n'ont pu être avec nous pour des raisons économiques. Durant ces journées, nous avons publié 5000 exemplaires d'information sur l'affaire, dans le style journal, nous l'avons ditribué durant les 5 jours, en générant ainsi notre propre publicité et en approchant beaucoup de monde.
Lors des initiatives du mois de septembre, pour commémorer l'anniversaire de l'injuste arrestation des Cinq, en étant à Washington, nous sommes retournés au Congrès et avons rendu visite à 7 cabinets. Nous leur avons fait le suivi des visites antérieures en informant le personnel des congressistes et des sénateurs sur les dernières nouveautés de l'affaire. Cette année, nous avons également réussi à faire que l'affaire des Cinq soit portée à la Convention nationale du Syndicat des Services (SEIU) où, grâce à l'aide des syndicalistes britanniques et d'autres de Californie, nous avons pu sensibiliser tous les délégués présents, près de 3000, sur l'affaire des Cinq.
Enfin, nous continuons, la campagne internationale "le 5 de chaque mois pour les 5", où arrivent à la Maison blanche des appels téléphoniques, des fax et des emails de tous les coins du monde demandant la liberté pour les 5.

- Quel est le niveau d'information du peuple américain sur l'affaire?
Malheureusement, le niveau d'information du peuple des Etats-Unis continue d'être très faible. C'est une affaire de justice basique mais très difficile à expliquer quand la conception des américains est totalement fausse vis-à-vis de Cuba. Ces personnes sont bombardées quotidiennement avec des mensonges sur la réalité cubaine. C'est une mission très difficile que d'ôter ce sentiment des gens et expliquer que Cuba, comme n'importe quel pays, a le droit de se défendre face au terrorisme. C'est pour cela que nous essayons de joindre le public de différente manière, à travers des événements publics, mais aussi à travers des expositions artistiques avec des peintures d'Antonio Guerrero et des caricatures de Gerardo Hernandez. Et avec des campagnes d'acteurs et artistes américains reconnus qui nous ont aidé cette année à réaliser deux vidéos Youtube sur l'affaire avec leur participation. C'est le cas par exemple de Danny Glover et Peter Coyote.



- En cas de réélection, le président Obama aura-t-il le pouvoir de signer la libération des 5 ? Pourquoi ne l'a-t-il pas fait durant son premier mandat?
Obama a en effet le pouvoir de signer la libération des Cinq, mais nous sommes dans une période très difficile, premièrement d'élection et deuxièmement à un moment où la droite est très forte au congrès des Etats-Unis. Les congressistes cubains (d'origine, ndr) de droite ne font pas de trève et continuent de mettre la pression y compris pour qu'Obama revienne sur les rares avancées vis-à-vis de Cuba, comme les voyages de cubains américains ou cubains résidents aux Etats-Unis et les autorisations "peuple à peuple", lesquelles ont déjà été limitées, et dont très peu ont été octroyées ces derniers mois.

L'affiche de la campagne "Obama...Give me five !"
Nous savons que c'est une affaire politique qui devra être résolue par cette voie, mais Obama ne va pas le faire sans que nous exercions une forte pression de toutes parts; de tous les pays du monde et avec encore plus de force à l'intérieur des Etats-Unis. L'administration américaine connait l'affaire, nous n'avons aucun doute à ce propos, et Obama signera si nous sommes capables d'exercer une pression sur lui, mission à laquelle nous devons tous nous consacrer, de dehors et d'ici à l'intérieur.

- Le comité conserve-t-il toujours autant sa volonté de lutter? 

Notre comité est pleinement engagé dans l'affaire des Cinq, avec leurs familles et le peuple cubain. D'aucune manière, nous allons nous lasser, ni cesser de lutter. Mais nous ne le faisons pas seulement pour les Cinq, mais également pour nous-mêmes; premièrement parce que nous croyons en l'innocence des Cinq, deuxièmement parce que nous devons beaucoup à Cuba, pour tout ce qu'elle fait pour le bien de l'humanité, et troisièmement parce que lutter pour les Cinq c'est lutter pour un monde meilleur. Nous sommes des citoyens du monde et nous nous le devons à nous-mêmes.

Propos recueillis par Sébastien Madau
Versión española
 

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